L’excision: une pratique sociale qui mérite de disparaître

Malgré la création de la journée internationale de la lutte contre les mutilations sexuelles féminines, qui se tient tous les 6 février depuis 2003, on estime que des millions de femme et filles sont encore victime d’excision. Cette pratique est en effet encore très répandue malgré les plans nationaux et internationaux mis en place, luttant pour l’abandon de cette dernière du fait de son caractère néfaste, dangereux et d’une grande violence.

D’abord, un point vocabulaire : l’Organisation Mondial de la Santé (OMS) distingue quatre types de mutilations sexuelles (MSF), aussi appelées mutilation génitales féminines (MGF), qui recouvrent les interventions incluant l’ablation partielle ou totale des organes sexuels externes de la femme ou autre lésion. Ainsi, l’excision correspond à l’une ces mutilations et est donc une « ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres, avec ou sans ablation des grandes lèvres »

Il est difficile de savoir d’où vient exactement la pratique de l’excision, même si certains chercheurs, notamment en sciences sociales, se sont posé la question : il semble qu’elle soit apparue avant le christianisme ou l’islam, dans les sociétés pharaoniques, avant de se répandre en Afrique à l’Est comme à l’Ouest dans différentes communautés ou pays. 

Cette intervention est le plus souvent infligée aux jeunes filles à un âge qui varie selon les pays, et les pratiques.  Effectivement, elle peut prendre place peu après la naissance, mais peut aussi être vue comme un rite de passage à l’adolescence. Cet âge tend à baisser : par exemple, l’UNICEF note qu’au Kenya, en 3 ans, la pratique de l’excision est passée de 12 à 9 ans. 

L’UNICEF dénombre aujourd’hui près de 200 000 millions de victimes : l’excision touche en effet de nombreux pays en Afrique mais aussi au Moyen Orient ou en Asie. L’agence onusienne montre que cette pratique est très répandue en Somalie, en Guinée et au Mali, où 90% des femmes et filles sont concernées, avec un constat similaire au Yémen, en Irak ou en Indonésie. Il faut tout de même noter que le phénomène ne concerne pas tous les pays d’Afrique, ou du moins pas avec la même ampleur : en Ouganda ou au Cameroun, l’excision ne touche que 1% des femmes et filles. 

Il semble que cette pratique soit liée à diverses raisons, qu’elles soient sexuelles, sociales ou religieuses mais qui, pour l’association « excision parlons-en », sont toujours le reflet de l’inégalité entre les sexes dans une société. Ce qu’il faut bien comprendre ici et cela pose difficulté, c’est que l’excision est une norme sociale, dont le caractère obligatoire est intériorisé par les populations. En effet, dans un rapport de 2010, l’UNICEF montrait déjà que, malgré le danger et la douleur que cela représente, l’excision est ancrée dans les mœurs comme témoin de la bonne éducation des filles, leur permettant de leur garantir un avenir. On peut ainsi dénombrer différentes justifications invoquées par les groupes qui pratiquent l’excision comme le contrôle de la sexualité des femmes afin de maintenir un état de domination masculine, ou encore comme la conservation de l’identité culturelle, qui permettrait de perpétuer la tradition, mais aussi comme liée à la religion ou à d’autre mythes, et enfin comme une mesure de propreté. 

Pourtant, l’excision comporte de grands dangers auxquels sont exposées les victimes. Ainsi aucune explication ne peut être entendable. D’abord, l’intervention est source de terribles douleurs : les lèvres et le clitoris concentrent de nombreux nerfs qui rendent l’intervention sans anesthésie très violente, provoquant des hémorragies. De plus, elle présente des risques importants d’infections vulvaires, urinaires ou gynécologiques, pouvant mener à la stérilité ou à la contraction du VIH. De manière plus radicale, l’excision peut provoquer la mort. Ensuite, la cicatrisation aussi peut être très douloureuse. En outre, les suites de l’intervention sont aussi porteuses de conséquences désastreuses : les victimes sont exposées à des problèmes urinaires ou menstruels, mais aussi à des complications obstétricales, nécessitant un accompagnement spécialisé souvent peu accessible. D’autre part, cela peut avoir des effets délétères sur le nouveau-né avec un taux supérieur à 15% pour les décès périnataux selon une étude de l’OMS. Enfin, en tant que femme, l’excision a des conséquences d’une part sur la vie sexuelle des victimes, mais surtout des conséquences psychologiques, en raison du traumatisme des violences, des douleurs ou de l’anxiété générée. 

Ainsi, l’UNICEF tente de lutter contre cette pratique et a déjà obtenu quelques victoires : aujourd’hui, une fille a 30% de moins de risque de subir des mutilations sexuelles qu’il y a trente ans avec la mise en place notamment de comités de protection pour l’enfance. Cependant, rien n’est gagné et l’excision est encore bien trop pratiquée. L’UNICEF s’inquiète quant à l’impact du covid sur la lutte contre l’excision, craignant plus de 2 millions de cas supplémentaires dans les prochaines années, avec en cause la fermeture des écoles, la difficulté d’interventions des ONG sur le terrain et le report de plusieurs programmes visant à lutter contre l’excision. 

Cet article n’engage que son auteur.

Carmen Roques

Sources :  https://www.unicef.fr/article/excision-deux-millions-de-cas-supplementaires-de-mutilations-genitales-feminines-pourraient

https://www.unicef.fr/dossier/excision-et-mutilations-genitales-feminines

www.excisionparlonsen.org

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