Les Chatouilles, film autobiographique d’Andréa Bescond, traite au travers du regard d’Odette de la pédophilie, du traumatisme mais aussi de la libération de la parole.
Le.a spectateur.trice suit l’histoire de cette petite fille d’une dizaine d’années violée par un proche de la famille. Celle-ci ne rêve que de danse, de ballet, pour s’échapper de cette invivable réalité. Une fois adulte les représentations s’enchaînent mais la violence des agressions resurgit. L’esprit et le corps s’en défendent alors en oubliant par l’alcool, les drogues et les excès. Des rencontres apporteront cependant une nouvelle considération et confiance à Odette qui parlera, dénoncera et se relèvera de l’horreur.
Ce film est un hommage à la mémoire : le.a spectateur.trice bascule entre les violences passées d’Odette et ses réflexions présentes. Ces bonds au travers du temps rendent compte de la force du traumatisme et des phénomènes d’amnésie partielle. Des passages oniriques s’emmêlent dans le récit, où la danse exprime des cris de souffrance comme de délivrance. Cette construction narrative porte avec rythme le voyage introspectif d’Odette.
Face aux viols subis par la petite fille, toujours filmés avec pudeur et justesse, l’impuissance, la gêne et la colère gagnent le spectateur. Témoin, se sentant presque voyeur, ce dernier est interpellé sur sa propre responsabilité et ses préjugés. Les mécanismes de manipulation du pédophile et ceux de défense de la victime sont parfaitement retranscrits.
Ce film rappelle que les monstres se trouvent majoritairement au sein des cercles proches et non aux coins d’impasses sombres. La violence transparaît également dans la réaction d’autrui : à la suite du choc de la révélation naît la haine, la culpabilité mais aussi le déni et la minimisation.
Malgré la dureté du propos et des images, Andréa Bescond arrive toutefois à apporter des moments de légèreté et de rire. Les Chatouilles alerte le spectateur sur la nécessité de rester vigilant, à l’écoute des signaux de l’enfant.
Par Valentine Lapierre.